Oumarou SIDIBE, journaliste
Moussa BADJI, Ecrivain
Cette réflexion n’a aucun but de dénigrer le réseau social TikTok, mais juste pour exprimer notre inquiétude quant aux sorts de ses utilisateurs jeunes dans le continent africain.
« Le monde est devenu un village planétaire ». A-t-on coutume de dire. On doit cela en partie à l’internet et aux réseaux sociaux. Aujourd’hui, il est facile de communiquer et d’interagir avec ses connaissances malgré des distances inimaginables qui nous séparent d’elles. Ils sont nombreux, les réseaux sociaux, qui nous facilitent cela. Dans cette réflexion, nous nous attardons sur TikTok. Cette application créée par le Chinois Zhang Yiming Il y a moins de dix ans en arrière, est incontestablement l’une des plus téléchargées sur Play store et App store aujourd’hui. Sa spécificité réside entre autre dans son caractère simple, créatif et ludique.
Tik Tok permet de voir ou de créer des vidéos de courtes durée allant de 5 seconde à 3 minutes à l’aide de son téléphone portable. C’est peut-être l’une des raisons qui fait sa popularité auprès des jeunes. Eux qui n’en demandaient pas plus. La plupart ayant horreur de l’écriture et de la lecture comme cela se fait sur d’autres réseaux sociaux, ils préfèrent l’option audiovisuelle offerte par TikTok. Une aubaine ! est-on tenté de dire, mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Dans l’utilisation de cette application, on pourrait déceler beaucoup d’abus surtout ici en Afrique. En effet, il n’est pas rare de voir des utilisateurs publier des vidéos à caractère sexuel, ou en tout cas, bafouant toutes les valeurs morales et mœurs si chères à l’Afrique et aux Africains.
Cette situation interpelle, quand on sait que des enfants sont exposés à ces contenus qui ne sont souvent pas appropriés à leur âge. C’est d’autant plus inquiétant quand on pense à ces millions de données personnelles balancées à des gens qu’on ne connait peut-être pas. Les utilisateurs de TikTok en ont-ils conscience ? font-ils exprès, se sentent-ils contraints de le faire ? Voici autant de questions qu’il sied de se poser. Pour notre part, nous pensons que les autorités des pays africains devraient se pencher sérieusement sur la question. Ceci n’est pas de la mer à boire pour elles, car on se rappelle, au Sénégal, en août 2023, l’application a été suspendue par le gouvernement en marge des manifestations de soutien à l’opposant Ousmane sonko. Dans son communiqué, le gouvernement sénégalais estimait que TikTok est : « le réseau privilégié par les personnes malintentionnées pour diffuser des messages haineux et subversifs menaçant la stabilité du pays ».
C’est vrai que cette mesure ne résout pas totalement le problème car les usagers disposent d’autres alternatives pour se connecter, elle constitue tout de même, un pas vers la prise de conscience. Les pays Africains ne devraient pas attendre qu’il soit trop tard avant d’agir.
Ailleurs, la question est traitée avec plus de rigueur. Juste pour illustration, en mars 2023, le directeur général de TikTok, monsieur Shou Zi Chew a été auditionné par le congrès américain. Dans ce pays, l’application est accusé « de ne pas suffisamment protéger les enfants ».
Le même exercice s’est déroulé en France juste quelques mois après. Deux responsables de TikTok France ont été auditionnés par le Sénat en juin 2023.
Eric Garandeau, directeur des Affaires publiques de TikTok France, et Marlène Masure, directrice des opérations France ont tenté, durant plus de six (06) heures de répondre aux questions des Sénateurs, sans toutefois pouvoir donner des informations satisfaisantes sur la gouvernance juridique de leur société ainsi que les questions de traitement des données personnelles.
Dans le continent asiatique également, TikTok est confronté à des défis notamment au Vietam et en Malaisie. En octobre 2023, le gouvernement malaisien a mis en demeure la plateforme affirmant qu’elle n’avait pas réussi à lutter contre les contenus diffamatoires ou trompeurs, conformément aux demandes du gouvernement. Dans le même mois, le gouvernement vietnamien a entrepris de faire une inspection approfondie des contenus de TikTok, qui selon lui « constituent une menace pour la jeunesse, la culture et les traditions du pays ».
Dans son pays d’origine, la Chine, l’application connaît des règles plus restrictives, pour ce qui concerne les jeunes. Douyin, c’est le nom de TikTok en Chine, uniquement en Chine. Depuis 2021, la plateforme a ainsi limité le temps passé sur son application à 40 minutes pour les moins de 14 ans, et ce de 22 heures à 06 heures du matin.
Ce ne sont là que quelques exemples parmi tant d’autres, afin de tirer sur la sonnette d’alarme ici Afrique. Présent dans plus de 150 pays au monde, TikTok profite à des millions d’utilisateurs également. On y trouve des professionnels de plusieurs domaines d’activités qui donnent des conseils pratiques et utiles à leurs abonnés. On peut donc dire, sans risque de se tromper que TikTok « autant il nous est utile, autant, il peut nous détruire ».
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