Syrie: à Damas, la diplomatie européenne plaide pour «une transition pacifique» et inclusive

En moins de quatre semaines, les nouveaux dirigeants syriens ont réussi à se faire accepter comme des interlocuteurs fréquentables par de nombreux pays. En témoigne la visite, vendredi 3 janvier à Damas, des chefs des diplomaties allemande Annalena Baerbock et française Jean-Noël Barrot. Ils ont notamment rencontré le nouvel homme fort du pays, Ahmed al-Charaa. Les deux ministres, agissant au nom de l’Union européenne, ont plaidé pour une transition pacifique et inclusive en Syrie, entre autres.

Appel à une transition pacifique et inclusive, appel à une solution politique avec la minorité kurde de Syrie, appel à la destruction des stocks d’armes chimiques hérités du régime de Bachar el-Assad… À Damas, les deux chefs de la diplomatie ont égrené leurs attentes, qui sont aussi celles des 27 pays de l’Union européenne.

La réunion était la première à ce niveau entre des responsables des grandes puissances occidentales et Ahmed al-Charaa, qui a pris le pouvoir le 8 décembre, après la fuite du président Assad. Jean-Noël Barrot et Annalena Baerbock, dont la visite intervient sous mandat de l’Union européenne, se sont réunis avec le dirigeant de facto de la Syrie à l’imposant palais présidentiel surplombant Damas, là même où Assad recevait ses hôtes.

La France et l’Allemagne veulent « favoriser une transition pacifique et exigeante au service des Syriens et pour la stabilité régionale », a affirmé Jean-Noël Barrot sur X. « Un avenir meilleur pour la Syrie signifie un transfert de pouvoir inclusif et pacifique, une réconciliation et la reconstruction », a pour sa part dit Annalena Baerbock à la presse après l’entretien avec le nouveau dirigeant syrien. « Il est désormais nécessaire d’instaurer un dialogue politique incluant tous les groupes ethniques et religieux et incluant tous les citoyens, c’est-à-dire en particulier aussi les femmes de ce pays », a-t-elle ajouté.

Visites à un rythme effréné

Des attentes, mais pas de conditions : globalement, le nouveau pouvoir syrien rencontre bien peu de réticences. Les diplomates arabes et occidentaux – y compris américains – se succèdent à un rythme effréné dans les bâtiments officiels qui appartenaient jusqu’ici au régime de Bachar el-Assad.

Un tel empressement est probablement dû à la volonté d’aider à la stabilisation du pays et de son voisinage régional. La nouvelle Syrie aiguise sans doute aussi les appétits des pays en quête d’influence au Moyen-Orient.

Issus d’une guérilla islamiste, les nouveaux maîtres de Damas ont su rapidement s’imposer comme des acteurs fréquentables jusqu’en Occident. Reste à savoir l’usage qu’ils feront de ce crédit politique.

Pour que les Kurdes « soient pleinement intégrés dans ce processus politique »

Face au défi d’unifier le pays, Ahmed al-Charaa s’est engagé à dissoudre les factions armées, notamment le groupe HTS. Il a annoncé son intention de convoquer un dialogue national, sans en préciser la date ni qui y serait convié, et indiqué que l’organisation d’élections pourrait prendre quatre ans.

Le chef de la diplomatie française a rencontré les représentants religieux de la communauté chrétienne, des figures de la société civile et s’est entretenu avec le chef militaire des Kurdes. Il s’est fait l’écho de leurs inquiétudes depuis l’arrivée des islamistes au pouvoir. « Une solution politique doit être trouvée avec les alliés de la France que sont les Kurdes pour qu’ils soient pleinement intégrés dans ce processus politique qui s’engage aujourd’hui », a-t-il dit.

À la veille de sa visite, Jean-Noël Barrot a eu un entretien avec le chef des Forces Démocratiques Syriennes (FDS, dominées par les Kurdes), Mazloum Abdi, qui contrôlent de larges parties du nord-est de la Syrie.

Son homologue allemande a également estimé que « ​​​​​​​l’implication de tous les groupes dans le processus politique est essentielle, comme l’est la sécurité des Kurdes ». Elle a appelé à « ​​​​​​​de sérieuses garanties de sécurité pour les Kurdes, ainsi que l’intégration des forces kurdes » dans la nouvelle armée.

Jean-Noël Barrot a par ailleurs annoncé que la France avait proposé l’organisation d’une conférence internationale fin janvier, « associant la Syrie et ses partenaires » pour accompagner la transition politique « dans la bonne direction ». Et il a proposé l’expertise de son pays et celle de l’UE pour aider les Syriens à rédiger une nouvelle Constitution.

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