Le groupe paramilitaire russe Wagner apporte-t-il un soutien aux Forces de soutien rapide (FSR) du général Hemedti dans le conflit qui oppose les FSR à l’armée soudanaise depuis le 15 avril ? Plusieurs enquêtes journalistiques et travaux de collectifs semblent étayer cette thèse.
Les Forces de soutien rapide (FSR) dirigées par Mohammed Hamdan Dogolo, dit Hemedti ont rejeté catégoriquement le 21 avril 2023 ce qu’elles ont considéré comme des « allégations » au sujet de l’implication du groupe paramilitaire russe Wagner aux côtés de leurs forces dans le conflit actuel au Soudan.
Les FSR ont accusé l’armée soudanaise de s’être liée à « des forces étrangères » selon un communiqué. Elles réagissaient ainsi à un reportage de la chaîne américaine CNN. Des médias américains, anglais, français et égyptiens ont évoqué les mêmes informations. D’autres organisations se basant sur des images satellites et des « sources ouvertes » accessibles à tous ont fait les mêmes révélations.
Selon ces différents médias, le groupe de mercenaires russes Wagner aurait fourni du matériel militaire aux Forces de soutien rapide au Soudan, y compris des missiles sol-air afin d’aider ces dernières à vaincre rapidement l’armée régulière dans le conflit qui les oppose au Soudan depuis le 15 avril. Avant même le début officiel du conflit.
Le rôle de la Libye
Deux avions militaires russes Ilyushin76 auraient quitté la base aérienne libyenne d’al-Joufra dans le sud, sous contrôle du maréchal Haftar et systématiquement utilisée par les Wagner. Ces appareils auraient fait plusieurs rotations dans la région entre le 13 et le 18 avril au moins.
Le média en ligne Africa Intelligence cite des sources américaines et de renseignement en France, selon lesquelles le groupe paramilitaire russe a tenté d’aider Hemedti, avec de l’équipement en partant de la Centrafrique vers al-Joufra en Libye.
Le maréchal Haftar a-t-il allumé l’étincelle du conflit entre généraux au Soudan ?
Ce seraient les renseignements égyptiens qui ont livré des informations très précises à leurs amis européens et américains, documents à l’appui indiquant l’implication des Wagner au Soudan et la livraison de matériels militaires aux forces paramilitaires soudanaises. L’Égypte est très inquiète des affrontements dans ce pays voisin avec lequel elle partage une frontière de 1300 kilomètres. Selon Le Caire, un groupe de combattants syriens serait arrivé au Soudan, recruté par Wagner.
Selon des sources libyennes, Le Caire est très mécontent de la situation et a exprimé ses craintes à son allié le maréchal Haftar. Une délégation égyptienne s’est déplacée à l’Est libyen pour exprimer le refus de l’assistance du maréchal Haftar au chef des Forces de soutien rapide. Khalifa Haftar a alors indiqué qu’il n’est pas responsable des actes du groupe paramilitaire russe. En réalité, ce sont « ses sponsors au Moyen-Orient, qui lui ont demandé d’envoyer des fournitures militaires au Soudan », selon The Gardian. Parmi ces fournitures, il y a des missiles antichar Kornet, précise le quotidien britannique.
« Les autorités au Soudan ont le droit de recourir aux services de Wagner »
Des sites spécialisés en suivi aérien ont en tout cas noté, depuis le 13 avril, des mouvements inhabituels de deux avions entre la Libye, la Syrie et le Soudan où ils auraient transporté des armes. Et aussi des mercenaires syriens, selon Le Caire.
Par ailleurs le contrôle satellite des mouvements de l’aviation a permis à des organisations qui s’appuient sur des sources libres comme le site Grijon basé aux Pays-Bas et qui suit l’activité en Afrique et au Moyen-Orient de retracer les mouvements des avions russes utilisé par Wagner.
C’est le cas également du collectifAll eyes on Wagner qui affirme que la Libye se transforme de plus en plus en une plateforme logistique pour appuyer les Wagner. Le maréchal Haftar aurait livré par Ilyoushin 76, le 13 avril, des armes aux FSR à Karm Toum, l’une des bases logistiques la plus importante pour les forces de Hemedti, située près de la frontière libyenne.
De son côté, le 26 avril dernier, lors d’une conférence de presse à l’ONU, Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères a bien considéré que « les autorités légitimes au Soudan, avaient le droit de recourir aux services de la société privée Wagner », soutenue par le Kremlin.
Par ailleurs, le général Hemedti a renoué les liens avec une vieille connaissance : Evgueni Prigojine. Selon Jeune Afrique, ils seraient en contact régulier depuis le déclenchement des hostilités à Khartoum. Un accord secret existerait entre les deux : l’or et des concessions minières au Soudan pour les Wagner contre leur aide militaire au FSR.
Partager