Le gouvernement congolais et l’ONU ont entamé, mercredi 28 février, la première étape du désengagement de la mission des Nations unies pour la paix, la Monusco, avec la base de Kamanyola, près de la frontière burundaise, dans le Sud-Kivu. La veille, les deux parties ont également commencé une mission dans cette région pour faire le point sur le retrait de cette mission, en place depuis 1999. La première phase de ce retrait commence par la province du Sud-Kivu.
Selon le ministre congolais des Affaires étrangères Christophe Lutundula, Kinshasa aspire à faire du retrait de la Monusco un modèle de transition, conférant ainsi à son pays une plus grande respectabilité sur la scène internationale et contribuant à améliorer son image.
La délégation sur place depuis mardi est conduite par Bintou Keita, représentante spéciale du secrétaire-général de l’ONU en RDC, et Mbuyi Katharina Wagner, conseillère principale du chef de l’État au collège diplomatique. Elles sont accompagnées des responsables des agences, fonds et programmes des Nations unies en République démocratique du Congo.
Ce mercredi, une cérémonie a donc eu lieu dans la base concernée par le premier retrait de la Monusco. « Kamanyola est la première base de la Monusco au Sud-Kivu qui ferme après la signature conjointe, par le gouvernement de RDC et de la Monusco, de la note sur le retrait accéléré, progressif, ordonné et responsable de la Monusco de la RDC », a dit la responsable onusienne.
La première étape de ce départ concerne 112 casques bleus. Le plan de désengagement de la mission onusienne, élaboré en concertation avec les autorités congolaises et approuvé par le Conseil de sécurité, prévoit cette première phase exclusive au Sud-Kivu. Le retrait complet des forces onusiennes est prévu d’ici à la fin juin.
Assurer la protection des déplacés internes, une tâche ardue
Le plan prévoit que, à partir du 1er mai, la protection des civils au Sud-Kivu relève entièrement de la responsabilité de la RDC et de ses forces de sécurité nationales. « Cette remise s’effectue dans un contexte particulier au cours duquel notre pays est fortement engagé dans la lutte contre l’agression par le Rwanda. Nous devons regarder les choses autrement et avoir confiance dans nos institutions », a déclaré le gouverneur intérimaire Marc Malago.
La clôture effective du désengagement dans la région est prévue pour le 30 juin 2024. Cela implique que l’armée et la police congolaises doivent renforcer leur présence dans la région, en particulier dans les zones abritant actuellement les personnes déplacées internes qui sont sous la protection des casques bleus.
Cette tâche sera ardue, car la crise sécuritaire autour du groupe rebelle M23 a alimenté la réactivation des groupes armés, notamment à Kalehe, Kabare et Shabunda, dans le nord du Sud-Kivu, depuis l’année dernière. Les factions Raïa Mutomboki et les groupes Nyatura, en particulier, ont profité de la crise du M23 pour se remobiliser et intensifier leurs activités respectives, selon les experts de l’ONU. La Monusco, elle, se concentrera à partir du 1er mai sur la protection des civils dans le Nord-Kivu et l’Ituri, conformément au plan convenu.
Crainte des habitants
En constatant le départ des soldats onusiens, les habitants de cette région s’interrogent sur la gestion et attendent beaucoup de la police congolaise en cette période où des troubles sécuritaires sont récurrents dans la région.
Avec ses lunettes, sous le parasol, Julienne Minyeko assiste au départ des casques bleus pakistanais. Elle reste méfiante : « Je ne vois pas de problème au fait qu’ils partent car nous avons des militaires et policiers en surnombre, nous avons aussi des jeunes patrouilleurs appelés balala-rondo qui vont collaborer. Nous voulons simplement que la police soit dotée de matériels mais surtout, qu’elle multiplie des patrouilles comme faisait la Monusco qui avait l’habitude de circuler dans les quartiers ».
Établie à Kamanyola depuis 2005, cette base de la Monusco assurait la protection des civils et la sécurité des populations dans une zone de 20 kilomètres carrés. La police doit donc en faire autant, estime Edame Bahati, président du conseil local de la jeunesse de la ville. « Nous interpellons la police ! Qu’ils ne soient pas des éléments de tracasseries dans notre contrée. Eux aussi doivent nous garantir la sécurité et participer ensemble dans les initiatives d’amener la paix dans notre pays », estime-t-il.
Face aux inquiétudes, le commandant de la police au Sud-Kivu le général Roger Isiyo se veut rassurant. « Je promets que les acquis du contingent pakistanais, mieux de la Monusco, seront préservés pour la paix et quiétude dans cette contrée avec loyauté, dévouement et professionnalisme, et dans le respect des droits humains », a-t-il dit.
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