Vingt-quatre heures après la décision de la Banque centrale russe de relever en urgence son taux directeur principal de 8,5% à 12%, le rouble s’est redressé ce mercredi 16 août. À la clôture de la Bourse de Moscou à 16 heures TU, le dollar s’échangeait en Russie pour 94,67 roubles, et l’euro pour 103,2. Cette décision a été prise dans le but de juguler une monnaie en chute et une inflation à la hausse. Une inflation dont tous les Moscovites voient les effets.
Caddies et sacs pleins qu’on place dans les coffres des voitures. À la sortie des centres commerciaux, dans la capitale russe, personne pour partir les mains vides. Pourtant, poser la question « vos achats vous coûtent-ils plus cher ? », c’est s’entendre répondre systématiquement un « oui » vigoureux, et la liste des produits concernés est longue, très, très longue.
« Le prix des pommes, par exemple, a augmenté. Avant, ça coûtait 80 roubles le kilo, maintenant, c’est plus du double. On a arrêté d’acheter du steak venu du Chili, aussi, on n’achète plus que du poisson russe, par exemple du saumon de Mourmansk », dit une mère de famille. « La viande a augmenté », confirme un homme. « La dinde, le poulet… C’est 20% plus cher. » « Les baskets, les vêtements, les livres aussi, ajoute-t-il. Il y a quelques mois, un t-shirt pouvait me coûter 1 500 roubles. Aujourd’hui, c’est plutôt 2 500. »
« Globalement, toute l’alimentation a augmenté, juge un autre habitant de Moscou. Mais je dirais que tous les produits de la vie courante aussi. Les matériaux de construction, les pièces de rechange pour les voitures ; absolument tout est plus cher. Les matériaux de construction, c’est en moyenne entre 10 et 15% depuis un an. » La viande plus chère, c’est aussi des prix qui augmentent d’autant plus au restaurant.
L’impact sur le pouvoir d’achat semble avoir été en général amorti: dans les grandes entreprises comme dans les petites, ils sont nombreux les Moscovites, à avoir reçu des augmentations de salaires cette année. Augmentations conséquentes, souvent à deux chiffres.
Une spirale inflationniste est-elle enclenchée ? Dans l’ensemble, les Moscovites rencontrés disent ne pas s’attendre pas à ce qu’elle s’arrête dans un futur proche. La Banque centrale, citée par les agences de presse russes, a elle averti dès le 15 août: « Une nouvelle hausse du taux directeur, après son relèvement mardi de 8,5% à 12%, est « possible » en cas d’accélération de l’inflation. »
Selon le quotidien Vedomosti ce jeudi 17 août, le retour à un contrôle des changes stricts, aurait été une hypothèse sur la table, finalement écartée. Des consignes informelles auraient en revanche été passées pour que les entreprises qui engrangent des recettes en devises les convertissent rapidement en grande majorité en roubles.
Autre sujet en réflexion: comment réduire le coût des importations. Un rouble plus faible permet certes de renflouer les caisses de l’État, et donc contribue à financer l’effort de guerre du Kremlin, mais de l’autre, il dégrade la balance du commerce extérieur. À cela, il faut ajouter que sous l’effet des sanctions et face à la détermination des Européens de se défaire de leur dépendance énergétique envers la Russie, les revenus issus de la vente du gaz et du pétrole – principale source de rentrées budgétaires -, ont plongé de 41,4% entre janvier et juillet, selon les chiffres du ministère des Finances. Le déficit fédéral pourrait ainsi s’amplifier cette année.
Toujours selon Vedomosti, pour soutenir le rouble, la Banque centrale cherche en tout cas à réduire la demande de produits importés. Sa présidente Elvira Nabiulina aurait ainsi, lors d’une réunion, invité le gouvernement à réfléchir à l’augmentation des droits d’importation.
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