Centrafrique: les dangers de la «pêche au cocktail toxique»

En Centrafrique, certains pêcheurs ont décidé d’abandonner les techniques classiques et d’attraper le poisson avec des substances toxiques. Ils composent un mélange avec des feuilles, des fruits spécifiques et sauvages de la forêt. Les poissons étouffent et meurent. Les pêcheurs n’ont plus qu’à plonger pour les collecter. Mais cette pratique pose de multiples problèmes : elle a des conséquences néfastes pour l’environnement, mais aussi pour les pêcheurs et les consommateurs.

En plein milieu de la rivière Oubangui, nous croisons l’équipe de Gaël, qui fait la pêche avec une pirogue de 12 mètres. Après avoir délimité la zone de pêche sur un rayon de 30 mètres, l’équipe verse des produits toxiques de fabrication traditionnelle fabriqués. Puis deux d’entre eux sautent dans l’eau. Sébastien, le chef de file, explique cette méthode : « La qualité de cette pêche, nous l’avons hérité de nos ancêtres. Il faut d’abord délimiter la zone de pêche avant de répandre le produit toxique que nous avons préparé dans des bouteilles. Pour obtenir ce produit, nous utilisons des fruits sauvages et des feuilles toxiques que nous composons dans la forêt. Rien que l’odeur peut étouffer les poissons. Nous versons enfin le produit dans l’eau et quoi qu’il en soit, les poissons vont le consommer. S’ils s’étouffent et meurent, les pêcheurs n’ont plus que sauter dans l’eau pour les ramasser. »

Si ce système permet aux pêcheurs d’obtenir des poissons avec peu d’efforts, les consommateurs, eux, se plaignent de cette pratique. Eude, qui a récemment mangé des poissons attrapés avec ces potions, témoigne : « Je partais au marché, je me procure des poissons frais que j’avais acheté. Une fois les poissons mangés, j’ai commencé à avoir des malaises et tout a fini par la diarrhée. J’étais obligé de me rendre à l’hôpital pour des soins. En tout cas, c’est un danger sur le plan sanitaire. »

Des produits toxiques aux effets négatifs multiples

Face à ce danger public, les médecins tirent la sonnette d’alarme. Jean Amede Mandjeka est nutritionniste : « La pêche est une pratique noble parce que vous recherchez du poisson pour la consommation humaine principalement. Je trouve que ce n’est pas raisonnable de pouvoir utiliser un produit toxique pour attraper un produit alimentaire parce qu’une des premières conséquences est la mort. Ça peut passer par de l’étourdissement, ça peut être aussi des infections au niveau respiratoire, puisqu’on consomme le produit, ça peut être lié à ça. Ça peut aussi entraîner des troubles psychiques, ça peut atteindre les muqueuses, ça peut aussi atteindre une partie de l’œil et rendre aveugle. C’est possible ! Ou alors, créer des perturbations de la vue. »

Selon le délégué des pêcheurs du port Sao situé dans le 7e arrondissement de Bangui, une dizaine d’entre eux sont devenus aveugles après avoir pratiqué ce type de pêche.

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