Les autorités kenyanes ont déclaré, mercredi, que six personnes avaient été tuées, lors de manifestations antigouvernementales. Les manifestants voulaient exprimer leur colère face à de nouvelles taxes, mais le chef de la police nationale avait décidé d’interdire ces rassemblements.
Six personnes ont été tuées, mercredi 12 juillet, dans plusieurs villes du Kenya lors de manifestations antigouvernementales interdites contre de nouvelles taxes, les autorités menaçant de mettre fin « à la culture de l’impunité » dans le pays.
« Des vies ont été perdues, des dizaines d’agents de la force publique et des civils ont été grièvement blessés et des pertes inimaginables pour l’économie du pays ont été occasionnées », a déclaré dans un communiqué le ministre de l’Intérieur, Kithure Kindiki, dénonçant « la violence généralisée » et « les pillages ».
« Cette culture de l’impunité va prendre fin », a-t-il prévenu.
Une source policière, qui a requis l’anonymat, avait fait état auparavant de « trois morts à Mlolongo » près de la capitale Nairobi, « où un groupe de manifestants avait bloqué la route pour protester et nous en avons aussi deux autres à Kitengela et un à Emali », respectivement situées à 30 km et 120 km au sud de la capitale. Le bilan a été confirmé dans ces trois villes par une autre source policière.
« Certains (émeutiers) ont été tués » lors d’une « confrontation avec des policiers déployés pour réprimer les émeutes », a déclaré la première source policière.
Un deuxième policier a confirmé « les décès à Mlolongo, Emali et Kitengela », sans donner plus de détails.
Dans le bidonville de Kangemi à Nairobi, plusieurs dizaines d’enfants ont été hospitalisés, certains inconscients, après que des gaz lacrymogènes ont été tirés près de leurs salles de classe, a déclaré à l’AFP le directeur de la clinique.
« Nous avons transporté 53 d’entre eux à l’hôpital et ils sont tous dans un état stable en attendant leur sortie », a-t-il précisé.
Les rassemblements, mercredi, dans plusieurs villes du pays ont été émaillés d’affrontements tout au long de la journée entre manifestants et forces de l’ordre, les premiers lançant des pierres, les seconds répliquant par des tirs de gaz lacrymogènes, notamment dans le bidonville de Mathare, à Nairobi.
La police a également fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser des manifestants dans la ville portuaire de Mombasa (sud).
À l’origine de la mobilisation anti-gouvernementale, le vétéran de l’opposition kényane, Raila Odinga, plusieurs fois candidat malheureux à l’élection présidentielle, avait accusé plus tôt dans la journée la police d’avoir « tiré, blessé et tué des manifestants », notamment à Nairobi.
« Ces rassemblements se déroulent pacifiquement jusqu’à ce que la police décide de les disperser avec des balles et des gaz lacrymogènes », a-t-il également affirmé au cours d’une conférence de presse.
Dans le bidonville de Kangemi dans la banlieue de Nairobi, une cinquantaine d’enfants ont été hospitalisés car des gaz lacrymogènes ont été tirés près de leurs salles de classe.
Certains ont été transportés « inconscients » mais ils « sont tous dans un état stable », a déclaré à l’AFP le responsable d’un centre de santé à Kangemi.
Des manifestations toutes les semaines
Le chef de la police nationale avait interdit les rassemblements prévus ce mercredi par l’opposition, au motif que cette dernière n’aurait pas prévenu les autorités.
Ces incidents interviennent quelques jours après d’autres manifestations meurtrières contre le gouvernement du président William Ruto dans plusieurs villes du pays. Au moins six personnes ont été tuées vendredi dernier au cours de ces rassemblements, selon le ministère de l’Intérieur. Des ONG ont dénoncé une violente répression policière.
Vendredi dernier, des manifestations avaient eu lieu dans plusieurs villes à l’appel de Raila Odinga.
« Ces réunions restent pacifiques jusqu’à ce que la police décide de les disperser avec des balles et des gaz lacrymogènes », a déclaré Raila Odinga mercredi.
« La police a tiré et a blessé et tué des manifestants dans diverses régions du pays, y compris ici à Nairobi », a-t-il décrié, indiquant renoncer à faire un discours devant ses partisans dans la capitale par crainte pour leur sécurité.
Vendredi, la police a tiré des gaz lacrymogènes contre son convoi à Nairobi. Elle avait fait de même pour disperser des rassemblements à Mombasa (sud) et Kisumu (ouest).
Samedi, des militants ont déclaré que la police avait utilisé des gaz lacrymogènes contre des représentants de la société civile qui demandaient la libération de dizaines de personnes arrêtées lors des manifestations.
La Commission des droits de l’Homme du Kenya a demandé l’ouverture d’une enquête sur tous les incidents signalés impliquant la police.
L’opposition vent debout contre le président Ruto
L’alliance Azimio de Raila Odinga, défait par William Ruto à la présidentielle d’août 2022 dont il estime qu’elle lui a été « volée », entend organiser des manifestations chaque semaine contre la politique menée par le gouvernement.
Frappés de plein fouet par les hausses de prix et taxes, de nombreux Kényans disent ne pas supporter les perturbations causées par les manifestations, et n’entrevoient guère d’amélioration de leur situation à court terme.
Selon une organisation du secteur privé, Kepsa, chaque journée de mobilisation représente des pertes de 3 milliards de shillings (environ 19 millions d’euros) pour l’économie du pays.
Entre mars et mai, la coalition d’opposition Azimio a organisé des manifestations antigouvernementales qui ont fait, selon les autorités, trois morts.
Début juillet, le président Ruto a promulgué une loi de finances qui instaure une série de nouvelles taxes, malgré les critiques de l’opposition et de la population de ce pays touché par une forte inflation.
Le texte prévoit notamment une hausse de la TVA sur les carburants de 8 à 16 %, ainsi qu’un impopulaire prélèvement sur les salaires afin de financer un programme de logement à bas prix.
Avec AFP
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